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Reportage à Bangui, République Centrafricaine, par un journaliste de Radio Ndeke Luka. ©Marc Ellison / Fondation Hirondelle Reportage à Bangui, République Centrafricaine, par un journaliste de Radio Ndeke Luka.

"Médiation", nouvelle publication de la Fondation Hirondelle

Visionner et/ou télécharger les pièces jointes :

"A quoi sert le Journalisme ?", une vaste et actuelle question, sujet du premier numéro de "Médiation", nouvelle publication semestrielle de la Fondation Hirondelle. Témoignages, partage d'expériences, réflexions croisées et chiffres clés, "Médiation" se veut un lieu de dialogue entre acteurs du domaine des médias et de la résolution des crises. A télécharger ci-dessus. Retrouvez aussi l'article introductif de ce premier numéro ci-dessous.

Depuis 23 ans, la Fondation Hirondelle fournit de l’information à des populations confrontées à des crises, en créant ou soutenant des médias et des équipes de journalistes sur le terrain. Dans ces contextes où la véracité d’une information peut revêtir un enjeu vital, nous sommes particulièrement attentifs au processus d’établissement et de vérification des faits. Mais est-ce là notre seul rôle ? Face aux nouvelles formes de propagande et à la concurrence des réseaux sociaux, face également à la crise du modèle économique des médias, les journalistes sont appelés à mieux expliquer les spécificités de leur métier et l’utilité de leur mission. A partir de notre expérience dans des sociétés en crise ou en mutation profonde, c’est pour contribuer à cette réflexion globale sur le rôle des médias et les enjeux de l’information que nous lançons « Médiation ». Cette publication semestrielle se veut un lieu de dialogue entre spécialistes, acteurs et partenaires du domaine des médias et de la résolution des conflits. Nous apportons dans ce premier numéro quelques éclairages et partages d’expériences, qui soulignent la contribution d’un journalisme responsable à la gestion pacifique des crises, et à la construction de sociétés plus apaisées.

Pourquoi le journalisme devrait-il témoigner de son utilité ? La question peut sembler incongrue, ou polémique. L’accès à l’information, mais aussi la recherche et la diffusion des informations et des idées sont, au même titre que l’accès à la santé ou l’éducation, reconnus comme des droits inaliénables et universels. C’est l’objet de l’article 19 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, adoptée par les Etats membres de l’Assemblée générale des Nations unies en 1948. Pourtant cette question est aujourd’hui plus que jamais d’actualité. A travers le monde, la confiance des populations envers les journalistes et les médias pour lesquels ils travaillent est historiquement basse : 43 % en moyenne à l’échelle mondiale, avec des planchers de 31 à 33 % dans des pays où le secteur médiatique est pourtant très structuré comme l’Australie, le Japon, la France ou le Royaume-Uni. La confusion entre information, propagande, rumeur ou opinion n’a jamais été aussi grande, y compris dans les pays les plus riches et bénéficiant des systèmes éducatifs les plus performants. Les réseaux sociaux ont donné l’illusion d’une « information » gratuite, accessible à tous, et pouvant se passer de professionnels chargés de la produire et de la vérifier.

Réciproquement, nombre de journalistes s’interrogent sur leurs responsabilités dans cette situation. L’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis ou le scrutin ayant abouti au Brexit ont été pour eux des détonateurs, des exemples de votes populaires qui ne sont pas éclairés par la connaissance des faits qu’ils ont pour mission de relater. Dans ce contexte, plusieurs réflexions émergent pour redonner au journalisme une légitimité qu’il aurait perdue auprès du grand public : du « journalisme constructif » promu par le « Constructive Institute » et l’université d’Aarhus (Danemark) à la définition d’une « mission pour le journalisme en temps de crise » brandie par le quotidien britannique The Guardian, elles tentent de revitaliser les médias en repensant leur déontologie. Très en vogue dans les pays du Nord saturés d’information, cette réflexion peut-elle y rester cantonnée ? N’a-t-elle pas au contraire tout à gagner à s’enrichir de l’apport d’expériences médiatiques situées dans des sociétés où l’information factuelle et pluraliste reste un bien rare voire précieux, singulièrement dans les pays en crise ou en transition démocratique ?