La Fondation Hirondelle a organisé, avec la Mission des Pays-Bas à Genève et l'ONG Article 19, un panel sur le thème de l'accès à l'information. Une discussion organisée dans le cadre de la 42ème session du Conseil des Droits de l'Homme.
Le 19 septembre dernier, le Palais des Nations à Genève a accueilli une table ronde réunissant acteurs institutionnel et médiatique et consacrée au thème de l'accès à l'information "un droit qui permet la réalisation des autres droits humains". Résumé de l'intervention de Caroline Vuillemin, Directrice de la Fondation Hirondelle, autour de 3 questions:
1. Pourquoi est-ce que le droit de savoir et d’être informé est particulièrement important dans les contextes fragiles ou pendant les conflits?
Lors d’un conflit armé, ou dans les pays fragiles, l’information est souvent absente. On ne sait pas ce qui se passe, ou alors que partiellement. C’est la rumeur qui circule et la peur qui s’installe. Parfois, c’est aussi une contrainte logistique ou technique qui fait que des populations sont privées d’information : la zone n’est pas couverte par des radios ou télévisions, il n’y a pas de courant, pas de réseaux téléphoniques ou internet. Cela peut sembler difficile à imaginer pour la plupart d’entre nous, mais la moitié de l’humanité en 2019 n’a pas accès à internet.
Or sans accès à l’information, ce sont tous les autres droits qui sont mis en danger, comme le droit à la sécurité lors des conflits. Est-ce que je dois quitter mon village ou rester ? Il y a-t-il des barrages ou des coupeurs de route sur le chemin ? Mais aussi des droits comme l’accès à l’éducation ou à la santé. Les écoles sont-elles ouvertes ? les hôpitaux toujours opérationnels? Enfin, être informés de ses droits permet aux citoyens du monde entier de demander que ces droits soient respectés, de rendre les autorités redevables de leurs obligations. C’est essentiel.
2. Comment les journalistes et les médias locaux peuvent-ils travailler dans ces contextes et rendre effectif l’accès à l’information?
C’est évidemment difficile principalement pour des raisons de sécurité. Mais il est possible, comme le fait la Fondation Hirondelle, de former des journalistes à une éthique et un professionnalisme qui seront leur principale protection. Il est primordial que les journalistes aient un lieu, le media, dans lequel ils peuvent travailler sans contrainte ni pression : une rédaction dans laquelle toutes les composantes de la société sont représentées afin que tous les sujets soient abordés, et tous les points de vue pris en compte. Le media, ancré localement, doit connaitre son public : en quelle(s) langue(s) parler ?, sur quel(s) support(s) ?, à quelle heure pour toucher le plus grand monde ?, etc.
Avec un journalisme factuel, équilibré et proche des préoccupations de la population, le media peut construire la confiance nécessaire avec son public, mais aussi avec les différentes parties au conflit afin de leur donner la parole et de les faire dialoguer.
3. Là où la Fondation Hirondelle travaille, est-ce que l’accès à l’information est facilité par les nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC)?
Oui et non! Oui car nous voyons certaines organisations de la société civile et des “influenceurs” maîtriser comme ici ces outils et communiquer largement avec les personnes qui ont accès dans le pays (un accès souvent limité aux zones urbaines et aux personnes avec un revenu suffisant) et au sein des diasporas. Mais dans ces pays toujours peu développés, la réalité est qu’il y a une fracture numérique, et que la vaste majorité de la population n’a pas accès à internet et aux réseaux sociaux. Plus inquiétant, les études montrent que quand il y a accès aux technologies, celles-ci renforcent les inégalités existantes dans la société : les hommes sont plus connectés que les femmes, les urbains plus que les ruraux, la classe supérieure et moyenne plus que les plus démunis, etc. Enfin, il y a, et c’est un phénomène global, un besoin d’éducation aux media et à l’information à combler afin d’accompagner l’utilisation de ces outils.
Rendez-vous à notre prochain événement au Palais des Nations durant la Geneva Peace Week le 6 novembre prochain sur le thème de L'inclusion des femmes dans l'espace médiatique pour favoriser la paix au Sahel: le rôle d'une radio locale.