SWI swissinfo.ch est le média en ligne de la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR), destiné à un public international intéressé par la Suisse. Veronica DeVore, responsable de l'audience, explique comment ce média de service public analyse et s'adapte aux nouveaux besoins de ses utilisateur·rice·s.
Comment SWI swissinfo.ch s'y prend-il pour comprendre les besoins d'information de ses utilisateur·rice·s ? Comment vous adaptez-vous à ces besoins d'information ?
Veronica DeVore : Nous nous adressons principalement à deux types de public : 1) les 813 000 citoyens suisses vivant à l'étranger ; 2) les personnes vivant hors de Suisse, dans l'un de nos dix marchés linguistiques, qui souhaitent en savoir plus sur ce pays. Pour comprendre les besoins de ces utilisateur·rice·s, nous dialoguons d’abord avec eux par le biais d'enquêtes, d'échanges sur les réseaux sociaux et sur nos propres plateformes. Notre dernière étude d'audience a par exemple montré que les Suisses de l'étranger ont besoin de rester en contact avec ceux qui vivent au pays, et d'avoir une vision d'ensemble régulière sur les événements de l’actualité suisse qui les intéressent le plus. Nous avons développé des formats pour répondre à ces besoins, tels qu'une plateforme de débat en ligne et un briefing quotidien.
Quant au public international intéressé par la Suisse, nos échanges nous ont appris qu'il a besoin d’informations qui concernent le lieu où il vit, mais aussi de débats ou d'idées inspirantes autour de la Suisse et de sa géopolitique. Cela nous a amenés à mettre en ligne une plateforme multilingue de débats sur l’actualité mondiale et des questions complexes telles que la neutralité. Nous comprenons enfin les besoins de nos utilisateur·rice·s grâce à l'analyse des données. Nous savons ainsi que 70 % de nos utilisateurs nous lisent sur des appareils mobiles. Nous pouvons voir où nos informations sont bloquées ou censurées, comme en Chine continentale et, depuis peu, en Russie. Et lorsque nous avons constaté un besoin d'informations fiables et accessibles sur la diaspora russe et les effets des sanctions liées à la guerre en Ukraine, nous avons créé un format vidéo pour YouTube qui permet aux utilisateurs russophones d'accéder à l'information, puisque YouTube n'est pas bloqué en Russie alors que notre site web l'est. Ce format a été visionné des centaines de milliers de fois depuis sa conception.
Quelles nouvelles tendances voyez-vous émerger ? Analysez-vous aussi le résultat de l'élection présidentielle aux États-Unis en termes d'environnement médiatique et de besoins du public ?
Nous constatons depuis des années, mais de façon de plus en plus marquée, que les gens ont tendance à suivre l’actualité par l'intermédiaire de plateformes sociales ou de podcast. Et nous adaptons notre narration : nous produisons des courtes vidéos résumant nos reportages pour atteindre l’audience de ces plateformes, et des podcasts sur la Genève internationale pour nos différents marchés linguistiques.
Les utilisateur·rice·s des médias aux États-Unis sont aujourd’hui fragmenté·e·s en communautés présentes sur différents réseaux sociaux, et ce depuis plusieurs années. Lors de la dernière campagne présidentielle, les candidat·e·s ont par exemple choisi d'apparaître dans des podcasts indépendants plutôt que dans des émissions de médias traditionnels ou « grand public ». Les adeptes des réseaux sociaux et des personnalités évoluant hors du champ habituel des médias ont souvent en commun le besoin d'appartenir à une communauté d'individus partageant les mêmes idées et de se sentir « vus » par cette communauté. Dans ces sphères, les reportages basés sur les faits sont souvent relégués au second plan. Ce paysage médiatique modifié a certainement eu un impact sur la dernière élection présidentielle.
Cet extrait est tiré du 13ème numéro du Médiation nommé "S'adapter à l'évolution des besoins d'information", que vous trouverez attaché en haut de cet article.