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François Sergent (au centre), lors d'une réunion éditoriale à la Fondation Hirondelle, en 2016. ©Fondation Hirondelle / Jean-Luc Mootoosamy François Sergent (au centre), lors d'une réunion éditoriale à la Fondation Hirondelle, en 2016.

"Donner la parole à tous": entretien-bilan avec le Rédacteur-en-chef de JusticeInfo.net

Après avoir assuré depuis 2015 le lancement et le développement éditorial de JusticeInfo.net, le site d'information de la Fondation Hirondelle sur la justice et les processus de réconciliation, François Sergent passe le relais du poste de Rédacteur-en-Chef à une nouvelle équipe chargée de mettre en œuvre une nouvelle phase du projet, davantage orientée vers le numérique. Interview bilan sur cette aventure éditoriale, avec un journaliste passionné par son métier.

François Sergent, après une riche carrière de journaliste et responsable de rédaction en France, en particulier au sein du quotidien Libération, vous avez rejoint la Fondation Hirondelle en juin 2015 pour assurer la rédaction en chef de JusticeInfo.net dans sa phase de lancement et de développement. Qu’est-ce qui vous a motivé à l’époque dans le projet Justice Info ?

C’est en janvier 2015 que j’ai rejoint la Fondation Hirondelle même si le site n’a été mis en ligne qu’en juin 2015. Je connaissais la Fondation Hirondelle, certains de ses responsables et compagnons de route comme Romaine Jean, Serge Michel, Jean-Marie Etter et nous partagions les mêmes valeurs éthiques et professionnelles. À la fois, un vrai souci de rigueur et d’équilibre journalistiques et la défense des droits humains et de la justice. L’idée de lancer un site ex nihilo m’a paru un vrai défi à relever avec le soutien de la Fondation, de ses équipes.
 
Quel regard portez-vous après 3 ans sur la mise en œuvre du projet médiatique Justice Info ? Quels moments ou productions particulières vous ont le plus marqués ?

Les débuts ont été difficiles. Nous avions sous-estimé les difficultés je dirais techniques et éditoriales de lancer un site, le financement était en deçà de nos espérances. Il fallait créer de toutes pièces un média, bilingue de surcroit et le faire connaitre et le diffuser au mieux. Un ensemble de défis éditoriaux mais aussi d’appropriation du  média. La difficulté a été aussi d’avoir une équipe de qualité mais éclatée entre Lausanne, Genève, Paris, Tunis, Kampala, ce qui rend plus difficile l’animation de la rédaction. Les échanges vitaux pour une rédaction ne sont pas toujours aisés par Skype, What’s app ou par mail.

Je mettrais en avant notre production en Tunisie où il y a eu une conjonction vraiment favorable : un moment important pour la justice transitionnelle dans ce pays, le seul rescapé du Printemps arabe et une correspondante très professionnelle, Olfa Belhassine. Le colloque que nous avons tenu en juin sur la justice transitionnelle à Tunis avec l’université de Warwick témoigne de cet ancrage. Mais, nous avons aussi une très bonne couverture d’un pays oublié ou négligé comme la Gambie. Le Mali où la transition est difficile et où la Fondation est présente est bien suivi. La CPI que connait si bien Stéphanie Maupas et qui sait expliquer ses activités parfois opaques a été aussi bien couverte. Je citerais aussi Pierre Hazan qui a donné un vrai socle académique et  journalistique, reconnu et lisible à notre site. Mais aussi, Ephrem Rugiririza rigoureux rédacteur en chef Afrique ou Julia Crawford qui nous a fait exister en Anglais.
 
Quels sont selon vous les défis éditoriaux et journalistiques à relever pour assurer la qualité des informations proposées par un média comme JusticeInfo.net ?

La justice transitionnelle est un sujet passionnel, car il touche à la justice, à la mémoire souvent antagoniste, à la transformation des sociétés et au vivre ensemble. C’est un sujet qui divise et c’est compréhensible. En gros entre ceux qui mettent en avant la paix à tout prix et ceux qui mettent en avant la justice. Je pense que cette contradiction est artificielle mais il faut tenir compte de ces sensibilités. D’autant que souvent la justice transitionnelle et internationale parait un instrument importé et imposé de l’Occident, ce qui n’est pas toujours faux notamment en Afrique ; mais cette situation sert aussi d’excuse ou de prétexte dans certains pays pour échapper à la justice et l’Etat de droit. Il faut naviguer entre ces écueils, donner la parole à tous, à la défense comme aux victimes, aux praticiens de la justice transitionnelle juristes ou universitaires mais aussi aux ONG et aux populations directement impactées. Ce qui peut-être une gageure mais est aussi un objectif qui rentre dans les missions de base de la Fondation Hirondelle.